18.6.10

Le Fils de la Tente




"Mais, piéton ou cavalier, le “Fils de la Tente” a peu changé, car le désert a gardé autour de lui sa majestueuse grandeur. Ainsi, le Bédouin a toujours pratiqué la sobriété, la fortitude, la patience et le renoncement; sa vie très simple l’aide a rester physiquement et moralement sain: ni maladie, ni inquiétude, ni hésitation. L’aspect des terrains et du ciel lui apparait presque le même, qu’il soit au voisinage de l’Euphrate ou près du “Fleuve d’or” de Damas. Les tribus se fractionnent pour la moindre divergence d’intérêts, pour le moindre conflit d’opinion; les frères se séparent courtoisement pour aller habiter à des centaines de kilomètres les uns des autres. La liberté que donne l’existence nomade assure au Bédouin l’indépendance héréditaire, il descend d’aïeux qui furent libres comme lui; sans jactance, simplement, il regarde avec fierté l’étranger, fils de vaincus. Anarchiste de par son ambiance, il n’a point de chef – les cheiks ne sont pas autre chose que des arbitres – , il se laisse dominer, non pas par des lois, mais par la conception qu’il a de la justice: il reconnait scrupuleusement les conventions et respecte les jugements de l’opinion publique. Il sait que le sang demande le sang, et si quelqu’un des siens a été lésé, il n’aura désormais plus d’autre souci que celui de la vengeance"


(Elisée Reclus, L'Homme et la Terre)

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